Les régions sahéliennes du Mali (Mopti, Tombouctou et Gao) dépendent fortement de l’élevage, qui fait vivre environ 30 % de la population et contribue pour près de 15 % au PIB national. Cependant, le secteur de l’élevage y est confronté à de nombreux défis : effets néfastes du changement climatique (sécheresses récurrentes, pâturages dégradés), insécurité et conflits, faibles rendements du bétail, insuffisance d’infrastructures pastorales, et difficultés de mobilité dues à l’occupation des pistes de transhumance. Ces facteurs accroissent la vulnérabilité des éleveurs et agro-pasteurs, qui peuvent perdre une partie importante de leur cheptel en cas de sécheresse sévère ou d’aléa majeur, compromettant ainsi leurs moyens de subsistance et la sécurité alimentaire.
On note par ailleurs une faible pénétration des services financiers adaptés au secteur agropastoral dans ces zones (crédits, assurances, épargne, etc.), alors même que de tels outils pourraient aider les éleveurs à mieux gérer les risques. L’assurance indicielle pour le bétail – qu’elle soit basée sur le fourrage disponible (mesuré par satellite) ou sur la mortalité du bétail – apparaît comme une solution innovante pour renforcer la résilience des éleveurs face aux chocs climatiques. Des régimes d’assurance indexée ont déjà fait leurs preuves dans d’autres pays sahéliens : par exemple au Kenya, le programme IBLI indemnise les éleveurs dès que l’indice de disponibilité fourragère (calculé via des données satellites) passe en dessous d’un seuil critique, ce qui permet aux éleveurs de se relever plus rapidement après une sécheresse sans attendre de constater chaque perte animale. Ce type d’assurance paramétrique verse des paiements déclenchés par un indice objectivement mesuré (déficit de pluie, végétation insuffisante, etc.) plutôt qu’après la mort effective de chaque bête, évitant ainsi des coûts et délais de constatation et offrant une protection collective efficace.
Au Mali, l’intérêt pour l’assurance agricole commence à se concrétiser. Un rôle crucial dans la résilience des pasteurs. Le Programme d’Appui au Secteur de l’Élevage au Mali (PASEM 2), financé par la Coopération suisse, s’inscrit dans cette dynamique en promouvant l’assurance bétail comme outil de gestion des risques. En effet, la promotion de l’assurance bétail dans les régions de Mopti, Tombouctou et Gao est explicitement identifiée comme une opportunité pour renforcer la résilience des communautés pastorales locales face aux chocs climatiques et économiques. C’est dans ce cadre qu’un projet pilote d’assurance bétail indexée sera mis en œuvre sous PASEM 2. Les présents Termes de Référence (TDR) visent à définir le mandat de la compagnie d’assurance qui sera recrutée pour concevoir et exécuter ce pilote d’assurance bétail sur 9 mois dans les régions ciblées. Le TDR servira de base à un appel d’offres pour sélectionner l’assureur le plus qualifié, selon le processus de passation décidé.
- Objectifs de la mission
L’objectif global de la mission est de concevoir, tester et évaluer un produit d’assurance bétail indexée adapté aux conditions agroécologiques du nord et du centre du Mali, afin de protéger les éleveurs et agro-pasteurs contre les risques climatiques (sécheresse, manque de pâturage, mortalité du bétail) et de renforcer leur résilience. Plus spécifiquement, la compagnie d’assurance recrutée devra :
- Adapter le produit d’assurance aux besoins locaux : s’appuyer sur une étude de référence auprès des éleveurs pour définir les paramètres d’une assurance indexée pertinente (indice fondé sur le fourrage disponible ou le taux de mortalité, seuils de déclenchement, etc.) correspondant aux réalités climatiques et pastorales de Mopti, Gao et Tombouctou.
- Concevoir et déployer un produit d’assurance pilote : développer le contrat d’assurance indicielle (conditions, tarification, mécanisme d’indemnisation indexé) et le mettre en œuvre à petite échelle auprès de 1 800 éleveurs/agro-pasteurs volontaires dans les zones d’intervention, afin de tester son fonctionnement sur la durée de la mission.
- Renforcer les connaissances et l’adhésion : mener des actions de formation et de sensibilisation des bénéficiaires cibles sur l’assurance bétail (principes de l’assurance indicielle, modalités du produit, droits et obligations, etc.), en collaboration avec les équipes terrain du projet, de façon à favoriser une bonne compréhension et acceptation du concept par les communautés.
- Mettre en place un système de suivi-évaluation : assurer le suivi continu du pilote (suivi des contrats souscrits, surveillance de l’indice choisi, détection des déclencheurs d’indemnisation) et évaluer les résultats de cette phase pilote, notamment en documentant les éventuels déclenchements et paiements d’indemnités, les retours d’expérience des assurés, ainsi que les améliorations à apporter en vue d’une éventuelle extension à plus grande échelle.
3. Résultats attendus
A l’issue de la mission de 10 mois, les résultats suivants sont attendus :
- Etude de référence réalisée : Une étude de démarrage (baseline) auprès des éleveurs et agro-pasteurs des zones ciblées est conduite en tout début de mission. Elle fournit un état des lieux des pratiques de gestion des risques, de la vulnérabilité du bétail aux aléas climatiques, ainsi que des attentes et besoins des éleveurs en matière d’assurance. Le rapport d’étude permet d’adapter le design du produit d’assurance aux réalités locales (choix de l’indice le plus pertinent, niveaux de couverture, modalités de paiement des primes, etc.).
- Produit d’assurance indexée conçu : Sur la base des conclusions de l’étude, un produit d’assurance indicielle bétail est développé et validé. Ce produit documenté comprend la formule de l’indice retenu (indice fourrage basé sur les données satellitaires de biomasse pastorale, ou indice mortalité basé sur les taux de pertes de bétail par zone etc), les seuils de déclenchement d’indemnisation, les modalités de calcul des primes et des paiements, ainsi que les conditions générales du contrat. Le produit est adapté aux conditions agroécologiques sahéliennes et conforme à la réglementation des assurances.
- Phase pilote mise en œuvre : Le produit d’assurance est effectivement déployé à titre pilote auprès d’un échantillon représentatif d’éleveurs et agro-pasteurs dans chacune des régions de Mopti, Tombouctou et Gao. Un certain nombre de polices d’assurance sont souscrites (le chiffre sera déterminé avec le projet, en fonction des moyens et de la taille de l’échantillon). Durant la période couverte, le mécanisme indiciel fonctionne conformément à sa conception : les données de l’indice sont collectées et suivies régulièrement, et des indemnisations sont déclenchées et versées aux assurés si les conditions indices atteignent les seuils prédéfinis (par exemple en cas de sécheresse sévère entraînant un déficit fourrager sous le seuil critique).
- Éleveurs formés et sensibilisés : Dans le cadre du pilote, les bénéficiaires et les acteurs locaux (services d’élevage, organisations pastorales) ont bénéficié de séances de formation/sensibilisation sur l’assurance bétail. Au moins 25 000 éleveurs (dont 30 % de femmes et de jeunes) auront été formés aux principes de l’assurance indicielle et à l’utilisation du produit. Cette sensibilisation aura contribué à améliorer la compréhension et la confiance envers l’assurance, créant ainsi une demande potentielle pour une extension du produit à l’avenir.
- Dispositif de suivi-évaluation opérationnel : La compagnie mettra en place un système de suivi-évaluation efficace du pilote. Ce dispositif inclut le suivi des contrats (base de données des assurés, encaissement des primes), le suivi de l’indice en temps quasi-réel (ex. analyse des images satellitaires NDVI pour le fourrage ou compilation des rapports de mortalité), l’identification rapide des cas de déclenchement d’assurance, et la procédure d’indemnisation correspondante. En fin de mission, un rapport d’évaluation du pilote est disponible, comprenant les statistiques sur la souscription, le déroulement du mécanisme indiciel (nombre de déclenchements, montants indemnisés s’il y a lieu), les retours des bénéficiaires et des parties prenantes, ainsi que des recommandations pour la suite (ajustements du produit, faisabilité d’une extension à plus grande échelle dans le cadre du PASEM ou au niveau national).